lundi 5 décembre 2011

Je ne suis pas celle que je suis-Chahdortt DJAVANN

Chahdortt Djavann est Iranienne, écrit en français et, peut-être, se raconte dans ce roman. Car comme elle le précise en fin de livre, ce roman n'est pas autobiographique mais certaines scènes sont inspirées de son vécu. Au lecteur de démêler le vrai du faux si cela lui en dit.

Ce gros livre qui, malgré le nombre de pages, se lit vite, raconte le dur parcours de Donya, jeune Iranienne arrivée à Paris, (presque) par hasard. Dans les années 80, elle habite Téhéran et est étudiante. Les mollahs sont au pouvoir,la république islamique proclamée. Comme pour une bonne partie des Iraniens, ce totalitarisme ne lui convient pas mais Donya, contrairement à la majorité, se rebelle, adoptant des comportements confinant à la folie suicidaire. Elle ment constamment, a des désirs de coup d'état, fait le mur de sa cité universitaire, se grime en garçon, n'est plus vierge, en vient même à se prostituer. Ce qu'elle veut par-dessus tout, c'est partir, quitter son pays qui l'étouffe et pour cela, tous les moyens sont bons, même le mariage avec un inconnu. De rêves en échecs, de déboires en déconvenues, Donya se bat et va atterrir en France. Comment, on ne le sait pas (encore). Arrivée à Paris, elle vit de petits boulots au noir, et ne parle qu'à une personne: son psychanalyste. La schizophrénie et le dédoublement de personnalité la guettent: tantôt provocatrice et provocante, tantôt débraillée, tantôt bavarde, tantôt silencieuse, elle se dévoile de façon surprenante.
Ainsi, le lecteur suit l'évolution de cette psychothérapie, et découvre l'enfance de cette jeune femme meurtrie, cause d'une grande partie de son attitude borderline.

Les chapitres sont courts, percutants, alternant la vie en Iran avec la vie à Paris. Cette Donya est une femme très complexe que l'on comprend mieux au fur et à mesure qu'elle avance dans sa thérapie et qu'elle dévoile des pans de sa vie. J'avoue que j'ai été déroutée par les premières pages (même les cent premières pages) de cet ouvrage, à la fois tentée de poursuivre et de raccrocher. Un côté "j'expose ma vie" qui me dérangeait m'amenait à freiner des quatre fers. Et puis, de fil en aiguille, j'ai été conquise, sans doute parce que j'ai décidé de faire abstraction du côté autobiographique, mais aussi parce que la narratrice (ainsi qu'elle est nommée dans le prologue) m'est apparue plus fragile qu'elle ne le paraissait, et surtout très courageuse.
J'ai terminé ma lecture il y a quelques jours et je sens que ce parcours atypique va me poursuivre pendant quelque temps. Donya est bien partie pour rester dans un coin de ma tête un bon bout de temps.
J'ai effectué une plongée dans l'Iran des mollahs et de la terreur passionnante qui m'a amenée à dévorer dans la foulée les quatre tomes de Persépolis de Marjane Satrapi, dont je vais bien vite parler.

Il est précisé que ce roman est le premier tome d'une série. J'ai très envie de continuer, de mieux connaître Donya, notamment de savoir comment elle a débarqué à Paris puisque son rêve initial était Londres.

Un grand merci aux éditions Flammarion pour ce cadeau.